L’histoire du poème «Demain, dès l’aube…» de Victor Hugo

Le 4 septembre 1843, un drame frappe Victor Hugo : Léopoldine, sa fille aînée, se noie tragiquement avec son époux. Le poète, dévasté, trouve refuge dans l’écriture pour exprimer son chagrin. C’est ainsi que naît l’un des poèmes les plus célèbres de la littérature française, Demain dès l’aube, extrait du recueil Les Contemplations, publié en 1856 lors de son exil sur les îles anglo-normandes.

Victor Hugo dédie le livre IV de Les Contemplations, intitulé Pauca meae – ce qui se traduit littéralement par « quelques vers pour ma fille ». Ce recueil est profondément marqué par la présence de Léopoldine, dont la mémoire imprègne chaque vers.

Demain dès l’aube raconte une promenade, celle d’un marcheur – Hugo lui-même – qui entreprend un pèlerinage annuel sur la tombe de Léopoldine à Villequier. Le poème décrit un voyage qui commence « demain dès l’aube » et se poursuit jusqu’au soir. Aucune indication géographique ni nom propre n’est mentionnée, permettant au lecteur de s’identifier à ce marcheur en deuil.

Ce texte poignant est une véritable déclaration d’amour à Léopoldine. Hugo y exprime une douleur profonde et universelle, tout en restant pudique et sincère. Les thématiques romantiques sont omniprésentes : paysages, sentiments, solitude et nature se mêlent pour traduire l’intensité de son chagrin.

Victor Hugo, dans sa marche silencieuse, exprime son désir ardent de retrouver sa fille. Cette incantation poétique est marquée par une réserve touchante : plutôt que de s’épancher dans la douleur, Hugo suggère, avec délicatesse, la peine et le manque, rendant son hommage encore plus poignant. Ainsi, Demain dès l’aube n’est pas seulement un poème d’amour et de deuil, mais un cri du cœur universel, capable de toucher quiconque a vécu la perte d’un être cher.

«Demain, dès l’aube…» de Victor Hugo

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

3 Septembre 1847.

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